Les grands abats d’eau et les périodes de sécheresse de plus en plus marquées en zone méditerranéenne impactent lourdement la rentabilité des producteurs de blé dur (@ E. Delarue).
Au fil du temps, la filière du blé dur a su relever de nombreux challenges pour répondre à des exigences en matière de couleur, sur la qualité des protéines en vue de la transformation et, plus récemment, sur la tolérance des variétés aux maladies foliaires.
Aujourd’hui, le changement climatique impacte lourdement la production, et les modèles de prévisions ne laissent guère d’incertitude sur l’accentuation des phénomènes météorologiques, déjà très difficiles à gérer pour les céréaliculteurs.
Le colloque annuel sur la filière blé dur – organisé en distance et qui a réuni pas moins de 200 personnes, le 2 février dernier – donnait la parole à différents acteurs de la filière. Confrontés chacun à leur niveau à la problématique, ils ont tenté d’apporter un éclairage sur les solutions envisageables. Car le changement climatique est bel et bien le nouveau défi à relever, pour l’ensemble de la filière.
Pas que la technique
En zone méditerranéenne, la variabilité du climat, très prégnante, impacte irrémédiablement les surfaces, les rendements, mais aussi la qualité. Sur les exploitations, on s’adapte, et la technique reste bien évidemment un levier sur lequel comptent beaucoup les céréaliculteurs.
“Le climat nous impose des fenêtres de travail de plus en plus courtes. La résilience de nos exploitations passera par des outils d’aide à la décision de plus en plus précis, tenant compte de la météo”, souligne Nicolas de Sambucy, producteur de blé dur et membre du comité de pilotage blé dur. “L’accompagnement des producteurs, proposé par
l’Association blé dur développement (ABDD), renforce déjà la diffusion de messages techniques, et permet de prendre des décisions au plus près du terrain”, poursuit le producteur camarguais.
Mais le changement climatique fait qu’il est de plus en plus difficile de tenir le planning des assolements sur l’année. “Le travail sur la diversification des cultures et les rotations peut aider à mieux se projeter sur plusieurs productions, avec un raisonnement sur plusieurs années”, ajoute Nicolas de Sambucy. Autre levier en matière de résilience, “le captage de l’eau l’hiver, et l’accès à l’eau en général, seront les enjeux majeurs des années à venir”, assure le céréalier.
Au-delà du système de culture et de l’exploitation, d’autres pistes pourraient amener davantage de sérénité sur l’exploitation vis-à-vis des problématiques climatiques, comme l’assurance récolte. Mais, en France, “le dispositif est mal défini dans la réglementation Pac pour le blé dur, et les grandes cultures en général. Il est indispensable qu’avec la prochaine programmation, il puisse être mieux adapté aux territoires de production, et qu’il prenne également en compte les problèmes de qualité, souvent très importants sur blé dur”, estime Nicolas de Sambucy.
Anticiper pour mieux accompagner
Du côté des organismes stockeurs, on s’efforce d’appréhender cette variabilité au mieux pour accompagner les producteurs. “Il y a un travail de fond prospectif et d’anticipation sur le variétal, destiné à répondre aux contraintes de nos terroirs, et sur les itinéraires de cultures qui puissent tamponner l’impact de ces aléas. Nous travaillons aussi beaucoup sur les nombreux outils d’aide à la décision en amont, pour vérifier de quelle manière ils répondent à nos problématiques”, rapporte Nicolas Prevost, responsable ‘Commercialisation / collecte grandes cultures’ chez Arterris.
Sur les rotations, il n’existe pas de culture miracle. Arterris y travaille, certes, tout en étant conscient que “sur les territoires de la région, les options sont limitées : elles doivent être raisonnées, mais ne restent que des solutions très locales, des filières de niche. Car, pour en maîtriser le coût à l’aval, il faut aussi travailler sur le débouché, son développement, la diversification des transformations, mais aussi rester dans une volumétrie compatible avec la commercialisation”.
Le collecteur tente aussi de limiter les effets de la variabilité climatique sur les volumes et la qualité, en anticipant au maximum les récoltes. “Tout ce que l’on pourra mettre en œuvre avant de rentrer la marchandise dans les silos aura énormément de valeur. Si l’on connaît la problématique à gérer au moment de la collecte en amont, on peut s’organiser en conséquence, gérer les allotements, sauver le maximum de marchandises, adapter nos flux logistiques, nos outils”, explique Nicolas Prevost.
Le changement climatique est aussi un défi du côté transformation. “L’ADN de la filière blé dur française est de s’adapter. L’échelle industrielle s’adapte aussi, et nous avons des démarches engagées pour répondre aux consommateurs, mais également à l’enjeu climatique. Depuis le lancement de la plateforme blé dur, des programmes de recherches ont été initiés sur les innovations agronomiques techniques et organisationnelles de la durabilité du blé dur. Un programme sur la transformation du blé dur – portant notamment sur la manière de diminuer la charge énergétique et la consommation d’eau – est aussi en cours”, indiquait Christine Petit, secrétaire générale du Syndicat des industriels fabricants de pâtes alimentaires et du Comité français de la semoulerie.
L’interprofession veut un plan d’actions
Le blé dur est certes dans une filière pro active, mais doit s’adapter. La surface et la production française de blé dur ont été divisées par deux en dix ans seulement. Les producteurs sont aujourd’hui dans une situation économique difficile, mais les activités de collecte, de transformation et d’exportation risquent également d’être déstabilisées à court terme.
“Nous sommes dans une période clé, notamment avec la préparation du Plan stratégique national et des discussions sur les outils de la Pac. C’est le moment d’avoir collectivement les idées claires, et de partager une vision pour l’avenir de la filière”, indiquait Éric Thiroin, président de l’AGPB, avant d’annoncer le lancement d’une étude stratégique par l’interprofession. Avec l’appui financier d’Intercéréales, de l’AGPB, du CFSI, du Sifpaf et de FranceAgriMer, celle-ci devrait démarrer dès le mois prochain, pour être finalisée d’ici novembre 2021.
Cette étude – qui vise “l’amélioration de la compétitivité de la filière et la relance de la production et de la transformation” – s’articulera autour de deux axes : les gisements de coûts/productivité, et les gisements de valeur. “L’objectif est d’identifier les solutions et de préparer un plan d’actions en vue de redynamiser la filière”, conclut Éric Thiroin.
Emmanuel Delarue
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