Bouches-du-Rhône 02/12/2022
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Jouques

'La petite Séouve', au service du local

Installé sur le plateau de Bède à Jouques, depuis deux ans, Benoit Laugier s'est lancé, avec sa compagne, dans différentes productions agricoles que tous les deux réservent à des débouchés très locaux.

Benoit Laugier, agriculteur et salarié sur la commune de Jouques.

© Crédit photo : ED

À 30 km au nord-est d'Aix-en-Provence, dans la zone la plus septentrionale du département - sur le plateau de Bède qui offre de beaux panoramas sur la Durance -, Benoît Laugier est un jeune homme heureux : voilà deux ans qu'il y est installé avec sa compagne. S'ils sont salariés tous les deux, le couple s'est lancé dans l'agriculture avec une approche bien à eux. Mélanie a créé son atelier de poules pondeuse, tandis qu'il cultive des céréales, des légumineuses et du fourrage. Des productions qu'ils réservent à des débouchés exclusivement locaux.

Si le jeune agriculteur est natif de Jouques, s'installer sur son village ne semblait pas forcément possible au départ. Après un bac agricole et un BTS en 'Agronomie système de cultures' qu'il passe au lycée agricole Valabre, en 2009, il travaille au château Pigoudet, un domaine viticole de 40 hectares, sur Rians. Le jeune homme y est salarié depuis bientôt 15 ans et seconde aujourd'hui son père, chef de culture.

La vigne l'a toujours passionné, mais le travail de vigneron, il l'a appris aux côtés de son père et de son grand-père, qui menaient des vignes du côté de la Tour-d'Aigues. Il oriente donc son apprentissage sur "les grandes cultures pour se donner l'opportunité d'apprendre autre chose". Les deux jeunes qui cherchent à acheter tombent sur une annonce diffusée sur un célèbre site web de petites annonces. Une propriété en grande partie boisée en vente sur le plateau de Bède. Plus exactement, un corps de ferme en ruine au milieu de 38 ha de terres. Benoît reconnaît 'La petite Séouve', puisqu'il est du secteur et y chasse souvent. Le jeune couple se porte acquéreur, mais l'affaire n'est pas simple. Benoît tient bon, et l'arbitrage lui est finalement favorable.

Les terres que Benoît achète ne sont en majorité pas cultivables. "Mais c'était une opportunité incroyable qu'il fallait saisir", indique le jeune agriculteur. Aussi, pour implanter son exploitation, il reprend en fermage 7 ha de terres autour de ses bois, des parcelles plus grandes et plus accessibles à travailler, ainsi que 5 ha du côté de Rians. Ici, le plus gros handicap est l'eau. Ou plus exactement le manque d'eau puisque, sur le plateau, les exploitations n'ont pas accès au Canal de Provence. Mais l'agriculteur s'adapte.

Un fonctionnement en 'réseau'

Inexploitées depuis des années, ses terres passent en bio rapidement. La première année, il sème de l'orge et se met à faire du fourrage. "Dans le coin, la demande est très importante et je reçois des coups de téléphone toute l'année", explique-t-il, alors qu'il met un point d'honneur à soigner le fauchage, les opérations de fanage et le pressage, pour optimiser la qualité nutritive de ses sainfoins, luzernes et foins. La démarche de Benoît est en effet de développer une activité agricole lui permettant de travailler sur le village et ses alentours. "Rester local, avoir des partenaires locaux et que ce que l'on produit puisse être consommé à Jouques", tel est son mantra. Pour le grain, ils ont développé un partenariat avec une exploitation agricole qui fait du maraîchage et des grandes cultures du côté de Gréoux. "Ils nous vendent le grain bio pour nos poules, et on leur vend nos œufs pour leur magasin. Et sur les grandes cultures et le fourrage, le fonctionnement est le même." Benoît tient absolument à approvisionner une demande alentour : "Nous fonctionnons un peu en réseau, dans lequel tout le monde élabore des produits d'un même terroir et s'y retrouve. Tous ces éleveurs et exploitants agricoles communiquent aussi respectivement sur leur façon de concevoir l'agriculture et de travailler".

Les lentilles vertes, un pari gagnant !

L'année dernière, quand la guerre en Ukraine éclate, Benoît décide de se lancer dans les lentilles vertes, "au cas où le village se retrouverait coupé du monde..." s'amuse-t-il à expliquer aujourd'hui. Il récolte 6 ha de lentilles vertes qu'il commercialise aujourd'hui en direct, par le bouche-à-oreille, grâce aux réseaux sociaux et tout un tissu de partenaires encore une fois très locaux. Des épiceries vrac ou des restaurants. Il a été démarché par des grossistes et la grande distribution, mais Benoît préfère que son produit puisse être consommé ici. "Est-ce qu'il ne faut pas que l'on revienne aussi à faire des cultures pour nourrir les gens localement ? Les lentilles sont une culture que l'on a un peu oubliée, mais pour les terres d'ici, au sec, le produit se défend bien", explique l'agriculteur.

Avec le fourrage, c'est aujourd'hui sa production phare. Le jeune homme exploite une dizaine d'hectares pour ses céréales et légumineuses, et environ cinq autres hectares qu'il réserve pour sa production de fourrage. Comme il est aussi équipé pour couper et stocker, il en achète également sur pieds à un producteur, qui a aussi quelques parcelles dans le secteur.

Entre son activité de salarié à plein temps au château Pigoudet et la gestion de ses terres, il travaille du lundi au dimanche. Mais l'activité sur la vigne s'est un peu ralentie ces derniers jours, ce qui lui permet de libérer du temps pour son exploitation. Il a déjà labouré une bonne partie de ses parcelles, et s'apprête à semer ses céréales à paille, blé dur et orge. Au printemps, ce sera le tour des lentilles vertes, des pois chiches noir et blond, mais aussi du sarrasin, pour répondre à des besoins identifiés localement.

"Une vraie satisfaction"

"Savoir qui serait éventuellement intéressé par tel ou tel produit nécessite d'anticiper, d'aller vers les autres, de se renseigner", et Benoît ne fait pas l'économie sur le temps qu'il y passe. Pour autant, il veut continuer de pouvoir choisir ses partenaires. "Voir mes lentilles vertes préparées dans une recette avec des noix de Saint-Jacques par un chef local est une grande satisfaction", reconnaît Benoît. Pour la suite, l'agriculteur se veut prudent dans ses choix et faire, dans la mesure du possible, ceux que les autres ne font pas, et toujours dans une logique vertueuse au plan local.

Aujourd'hui, il commence à dégager un certain revenu de son activité agricole, "mais quand on commence avec presque rien, c'est toujours difficile, et je me contente pour l'instant de réinvestir pour m'équiper", confie-t-il. Aussi n'a-t-il pas l'intention de lâcher son activité salariée de chef de culture adjoint.

Pour la suite, il aimerait bien aussi remettre en cultures d'anciennes terres agricoles reprises par la forêt : une dizaine d'hectares (toujours classées an AOP Coteaux d'Aix) laissée inculte est, pour l'instant, gelée. Son souhait de les voir reclassées reste possible, vue la politique agricole ambitieuse de Jouques qui veut créer une Zone agricole protégée sur le territoire communal. 

Emmanuel Delarue •

Les CHIFFRES-clés

Benoit Laugier, 33 ans, s'est installé en 2020 sur Jouques

L'agriculteur cultive sur une douzaine d'hectares, céréales, légumineuse et fourrage.

Il a produit cette année environ 400 kg/ha de lentilles vertes

Sur la ferme, la vente des œufs d'une centaine de poules complète les revenus

Emmanuel Delarue •

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